Biographie

L’œuvre d’Aernout Mik porte un regard ironique sur le comportement humain placé dans des situations insolites. Ses œuvres donnent à voir des états physiques et psychologiques plus que des séquences ordonnées selon une linéarité narrative. Entre le rire et les larmes, la panique et l’abattement, l’impassibilité ou la surexcitation, ses personnages évoluent dans l’univers clos, froid et factice d’un laboratoire ou d’un studio de cinéma dont la scénographie est réduite au strict minimum. Ils sont immobiles ou animés. Ils ne dialoguent pas. Ils vivent parallèlement les uns par rapport aux autres. Ils doivent faire face à toutes sortes de stimuli et leurs réactions désordonnées sont volontairement contrastées.
Dans chacune de ses œuvres, les personnages semblent à leur place jusqu'à ce que nous découvrions au fil de l'observation des détails perturbants, des comportements inadéquats et inattendus. La caméra d' Aernout Mik glisse pourtant, indifférente, sur ces incongruités, les neutralise et nous ramène vers une réalité plus rassurante, avant que d'autres bizarreries ne ressurgissent à l'image. Nous oscillons ainsi sans cesse entre réalisme et fiction. Dans ses installations vidéo, Aernout Mik nous emmène au beau milieu d'une situation de crise dont on ignore toujours les causes et dont on ne découvrira jamais les effets. Nous sommes transportés dans un espace où le temps s'étire, où le scénario s'est effacé ; il n’y a ni début ni fin, seulement la perception d’une durée.
Aernout Mik travaille selon un principe : il met en scène des situations vraisemblables et ambiguës, dont les circonstances demeurent indéterminées. Ces êtres en situations ne sont pas des personnages individualisés, mais des gens indifférenciés, définis par un ici et maintenant, par leur appartenance à un même lieu et un même temps. Le public est totalement immergé dans l'action, mais tout comme les acteurs de la scène, il ne peut capter la totalité de la situation. Il ne peut se référer à la durée concrète d'un événement, qui est d’ailleurs un non-événement. Le mouvement de la caméra est déterminant. Les lents travellings, les déplacements sont prévus pour agir sur la perception du spectateur.
L’œuvre de Mik montre l'impuissance d’un individu immergé dans un monde indifférent. Bien que des êtres coexistent et partagent une même expérience dans un même lieu, ils demeurent isolés et désarmés. Un événement collectif vécu simultanément par un certain nombre ne suffit pas à fonder une communauté.

Elodie Vouille