Theme Song, 1973
Bande vidéo 1 Pouce Pal numérisée, 4/3, noir et blanc, son (angl.), 32 min 53 sec
On retrouve dans Theme Song les problématiques communes à plusieurs autres bandes vidéo (Undertone, Remote Control, Turn On), une volonté d'établir un champ de pouvoir, une tension entre un (une) autre et lui, entre le spectateur et lui.
Vito Acconci est allongé sur la moquette, la tête sur le bras, les pieds dirigés vers un canapé qui ferme l'espace à l'arrière-plan. Son visage, tourné vers le spectateur, remplit la moitié de l'écran et semble vouloir sortir du cadre afin de se faire plus proche. Par cette mise en scène, l'artiste suggère qu'il est réellement là, derrière la vitre, dans la profondeur du moniteur, dans un lieu privé mais presque neutre (allusion directe à la télévision comme objet domestique et populaire).
Vito Acconci allume une cigarette et actionne un magnétophone, situé hors-champ, qu'il partage avec le spectateur pour lui faire écouter les thèmes des chansons populaires de rock américain qui vont structurer et rythmer ce face-à-face. Partant littéralement des paroles chantées par Jim Morisson, Bob Dylan, Van Morisson, Kris Kristofferson, il développe un long monologue de séduction. Avec l'insistance du dragueur, il s'installe dans l'espace du spectateur et lui intime de se rapprocher, de venir près de lui. Entre candeur et manipulation, il proteste de son honnêteté et force la relation. Le registre envoûtant de sa voix qui chantonne, les mouvements lents de son corps, tout suggère l'enveloppement possible. Par cet essai de manipulation d'un spectateur invisible, par cette volonté de faire disparaître l'écran, de faire oublier la technique et la distance, Theme Song peut être rapprochée de Remote Control et, par le rôle et la place assignés au spectateur, de Turn On et Undertone.
L'effet de réel de la mise en scène, les chansons quasi génériques et le ton intime du discours de l'artiste, tout concourt à faire de cette bande vidéo un travail sur un mode particulièrement affectif et ironique de la problématique du contrôle à distance.
Kamel Boukhechem