Teaching and Learning as Performing Arts, Part 2, 1979

Bande vidéo 1 Pouce PAL numérisée
4/3, couleur, son, anglais
81 min


Cette oeuvre est constituée d'une longue série de projets pour traduire par la vidéo quelques propositions artistiques présentées dans le livre Teaching and Learning as Performing Arts 1, publié en 1970, livre dans lequel des artistes tels que John Cage, Dieter Roth, George Brecht, Allan Kaprow, Joseph Beuys, montrent comment résoudre des problèmes qui touchent à l'enseignement et à l'apprentissage par des techniques de participation qu'ils développent dans la pratique du happening, de la poésie d'action et de la poésie visuelle, de l'environnement, du film, du spectacle de rue, de la musique non instrumentale, des jeux, des échanges de lettres, etc. Par ce "pluri-livre" (que l'on appellerait aujourd'hui livre interactif), Robert Filliou installe une sorte de dialogue avec le lecteur, auquel il laisse autant de place qu'à lui-même. Il lui propose de considérer l'art comme une "participation au rêve collectif" et de considérer en particulier "la pratique des artistes comme l'usage créatif des loisirs".
Ce document fait suite à la vidéo Portafilliou réalisée deux ans auparavant, dans laquelle, sous la forme d'un cours, Robert Filliou retrace son parcours et montre des fragments de ses travaux antérieurs. Il applique ici un processus cognitif en vue d'une redéfinition des systèmes d'apprentissage et de connaissance, à travers diverses petites séquences faites de courts monologues - où Robert Filliou est seul face à la caméra, soit dans un espace clos, soit dans la rue en train de fixer le ciel - et de micro-performances réalisées par lui-même ou par d'autres artistes. L'ensemble de ces séquences est filmé avec une grande économie de moyens, de mouvements, de montage, de trame sonore, propre à Robert Filliou, qui laisse pleine place à la profusion d'idées, de pensées et de poésie. L'artiste a une présence physique qui donne un impact à ses prestations, de longs regards fixes et méditatifs, une articulation détachée et attentive : "Il appuie sur les syllabes comme pour souligner l'étonnement des mots."2
Le déroulement de cette bande reprend le mode de présentation d'un livre. L'énoncé du titre et du premier chapitre est fait par Robert Filliou lui-même. Il y a deux Robert Filliou : le Robert Filliou du moniteur donne des ordres au Robert Filliou qui se tient debout près du moniteur et qui exécute les ordres (tel le maître et l'élève, ou le maître et l'esclave). Le Filliou élève est chargé d'inscrire à la craie sur une planche les titres des divers chapitres des performances (leçons de prises de contact avec le monde). Ces intermèdes ponctuent toute la durée de la bande, où alternent Robert Filliou parlant depuis le moniteur et le film lui-même.
a) Video Dinner. Un étudiant, assis de dos devant un moniteur, dialogue avec Robert Filliou qui, tel un présentateur du journal télévisé, fait face à cet étudiant - comme au spectateur. L'artiste l'interroge et l'entraîne dans une prospection du monde et de la connaissance ("on boit la même eau que les dinosaures, lui a dit son frère"). Il l'initie à la musique télépathique.
b) Four dimensional space time continuum. Robert Filliou filme la rue, tout en faisant en voix off un commentaire sur l'essence des choses : "A bird is incomprehensible. A bourgeois is incomprehensible. A bird eaten by a bourgeois, it's a meal […]. A bourgeois eaten by a bird, it's a miracle."3
c) Recycling. Robert Filliou, assis en tailleur, parle entouré de chapeaux. Une femme chante l'histoire d'une femme partie car on n'a pas su la rendre heureuse. Robert Filliou se coiffe rapidement des divers chapeaux.
d) Skeye Analysis. Il s'agit d'un plan fixe sur le visage de Robert Filliou, qui regarde le ciel la tête renversée en arrière. Il parle et confie des pensées sur la situation de l'artiste face au monde et sur celle de l'art en tant que source d'énergie. Le ciel, absent du cadrage, se reflète dans les lunettes de l'artiste.
e) Bed time her / his story, sous-titré "The names of some celebrities translated into japonese". Un Japonais, filmé en plan serré, se déshabille, assis sur un lit à la tête duquel il y a un moniteur éteint ; puis il se couche, enlève sa montre et allume la télévision. Robert Filliou apparaît sur l'écran, récitant les noms des artistes qui ont fait l'histoire de l'art et ajoutant à chacun le mot "san" (qui indique la personne en japonais). Le Japonais éteint le moniteur et s'endort.
Les trois dernières séquences sont sous forme d'une performance :
- Video - Univercity, Travelling light - It's a real dance. Robert Filliou est sur une scène, faisant face à une audience invisible à laquelle il s'adresse. Il exécute des actions tout en les commentant, et interroge l'assistance en l'invitant à participer au rêve collectif, à l'usage créatif des loisirs…
- Video Breakfasting together… If you wish. Robert Filliou boit du thé en lisant le journal. Assis en bout de table face à l'écran et au spectateur, il l'interpelle ("Hey you"), l'invite à ouvrir le journal à la même page que lui, commente les offres d'emplois du point de vue du travail de l'artiste. C'est un prétexte à considérer les valeurs morales et sociales, exalter le rôle chamanique de l'artiste et les bienfaits du désapprendre.
- Video Breakfasting with Roy Kiyooka. Roy Kiyooka, assis à une table, visionne Video Breakfasting together... sur un moniteur installé comme un convive. Il boit du thé, fume, lit le journal, comme le lui propose Robert Filliou. A son tour, il commente les petites annonces et les pensées de Robert Filliou, et ajoute les siennes.


Catherine Ouy


1 Editions König Frères, Cologne / New York.
2 Pierre Tilman, On recherche le dénommé Filliou, Robert, Paris, éd. Coprah, 1994.
3 "Un oiseau, c'est incompréhensible. Un bourgeois, c'est incompréhensible. Un oiseau mangé par un bourgeois, c'est un repas. Un bourgeois mangé par un oiseau, c'est un miracle."