See Through, 1970
Film Super 8 transféré sur bande vidéo, numérisée
4/3, couleur, silencieux
Dans See Through, Vito Acconci boxe son image devant un miroir. Nous ne voyons que le buste et le reflet de l'artiste. Les mouvements de ses bras ont une faible amplitude. Dans les premiers instants, les coups de poings sont contenus, puis ils heurtent le miroir et le brisent. La durée du film est celle de la montée de cette tension ou colère du moi en lutte avec lui-même. Contrairement à ce que nous pouvons voir dans de nombreux travaux de Vito Acconci, le lieu de cette action n'est pas le corps, mais l'espace restreint entre l'individu et son reflet, dans l'extériorisation du conflit.
Ce sujet a été abordé antérieurement dans Shadow Box (octobre 1970), une performance dans laquelle l'artiste frappe à la fois sur son ombre et sur le mur de la galerie, en cherchant à mettre en évidence tous les effets produits par l'action : le bruit, le déplacement dans l'espace, ainsi que les qualités physiques du boxeur occasionnel. See Through exclut le son, d'une part, la reconnaissance du lieu où l'action se produit par le cadrage en très gros plan, d'autre part, et limite la perception du corps qui est restreint au buste. Le film n'est pas tant la trace d'une performance qu'une sélection des signes essentiels à la création du sens, selon Vito Acconci.
Si le miroir a une place importante dans l'art "postmoderne", comme outil conceptuel qui déplace la réalité de façon critique, et comme objet en rupture avec la pensée et les pratiques modernistes, Vito Acconci ne l'utilise pas dans ce sens. Le miroir est ici une matière prise dans l'épaisseur de l'individualité, un référent au mythe de Narcisse et à la psychologie, un lieu de transfert du moi.
Dans l'oeuvre de Vito Acconci, la vidéo ou le film Super 8 sont un espace de présentation de processus humains. Leur mise en scène invite le spectateur à réfléchir, à partir de l'énoncé de l'artiste, sur lui-même et sur son vécu.
Thérèse Beyler